En plein boom médiatique sur la question de l’accompagnement sexuel, suite aux propos de Sophie CLUZEL inaugurant la 5ème Conférence Nationale du Handicap, ce 14 février jour de la Saint-Valentin nous permet d’aborder la question de la vie intime, affective et sexuelle des personnes en situation de handicap.

Notre propos n’est pas de faire l’apologie d’une injonction sociétale, et somme toute assez mercantile, à célébrer un idéal de couple normatif, et le plus souvent hétérocentré et « validocentré ».

Pour les personnes en situation de handicap, ce 14 février peut faire violence, en ce sens qu’il laisse bien souvent transparaître leurs difficultés d’accéder à une vie intime, affective et sexuelle, que ce soit dans le cadre d’un handicap acquis ou congénital, au domicile ou en établissement.

Bien que la sexualité ne soit pas un droit créance, elle s’inscrit dans le cadre des libertés fondamentales que nul·le ne devrait entraver afin de parvenir à atteindre et à maintenir une bonne santé sexuelle.

Telle que l’a définie l’Organisation Mondiale de la Santé [OMS], en 1975 et en 2002, la santé sexuelle ne se résume pas à l’absence de maladie, de dysfonction ou de handicap.

La santé sexuelle est un état de bien-être physique, émotionnel, mental et sociétal relié à la sexualité.

De nombreuse études ont montré que la santé sexuelle était en lien avec la santé physique et la santé psychique. Il s’agit d’un vécu subjectif, et la santé doit être appréhendée comme un préalable et une ressource au service de chacun·e d’entre nous pour nous réaliser dans notre existence, selon nos propre choix de vie, dans le libre arbitre et en toute autonomie.

L’OMS est allée encore plus loin en rappelant que la santé sexuelle exige une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences plaisantes et sécuritaires, sans coercition, discrimination et violence.

Sainte Rita est réputée pour intercéder pour les causes difficiles ou désespérées.

Malheureusement, évoquer la vie intime, affective et sexuelle des personnes en situation de handicap nous renvoie plus à Sainte Rita, réputée pour intercéder pour les causes difficiles ou désespérées, qu’à ce « charmant » Valentin, Saint patron des amoureux·ses !

En effet, de nombreux obstacles subsistent, que nous devons connaître afin de mieux les surmonter :

  • Les personnes en situation de handicap sont encore trop souvent présentées comme des personnes éternellement vulnérables, incapables de formuler leur choix en matière de sexualité.
    Parfois infantilisées, leur parole est encore bien trop souvent discréditée.
  • La sexualité persiste à n’être évoquée qu’au travers du prisme des risques et des dangers qui lui seraient inhérents et non comme une possibilité d’épanouissement et d’accroissement de la qualité de vie, ou simplement vecteur de plaisir.
  • Trop peu de professionnel·le·s de l’accompagnement et du soin sont formé·e·s, et ont encore parfois du mal à ne pas projeter sur les personnes accompagnées leurs propres représentation et leurs valeurs. Il est nécessaire de leur proposer un travail sur leurs représentations et sur leurs postures professionnelles. Ou bien, ces professionnel·le·s n’osent pas aborder ce sujet avec les personnes concernées car il ne se sentent pas légitimes. Or, la non-traitance est bien souvent pire que la maltraitance.
  • L’entourage et les familles doivent se voir offrir des espaces d’expression et de partage d’expériences. C’est le plus souvent une réelle souffrance de se confronter au quotidien à l’intimité de leur.s proche.s dont la vie privée devient transparente aux yeux de tou·te·s du fait de la situation de handicap.

C’est la personne qui vit une situation de handicap qui est experte de sa propre vie.

Au-delà des imprécations et des atermoiements médiatiques, et quels que soient la nature et l’origine du handicap, nous nous devons désormais de restituer à la personne en situation de handicap sa capacité à être reconnue comme experte de sa propre vie, en passant du statut aliénant d’objet de compassion et de soin, à celui de sujet de désir, à la fois désirant et désirable.

Alors peut-être, enfin (!), pourrons nous cesser d’invoquer Sainte Rita, patronne des causes difficiles, afin de partager nos choix d’existence avec nos valentin·e·s, de façon inclusive, chacun·e à notre manière, et quelle que soit notre orientation et nos besoins spécifiques.

Belle Saint Valentin à tou.te.s !…

François CROCHON
Sexologue clinicien
Directeur du CeRHeS® France
www.cerhes.org